Le Temps du 10.06.2011
Le parti a déjà exclu des membres jugés trop extrémistes
Valérie de Graffenried Berne
A quel point Oskar Freysinger et ses fréquentations avec des milieux de la droite radicale européenne gênent-ils l’UDC? A Berne, les parlementaires du parti contactés ne veulent pas tirer à boulets rouges sur un des leurs, qui plus est locomotive électorale efficace pour le Valais, mais la plupart admettent, en privé, qu’ils n’auraient pas cherché à rencontrer un personnage aussi sulfureux que Geert Wilders. Et que les provocations d’Oskar Freysinger commencent à lasser: le Valaisan maintient qu’il entend faire venir le Néerlandais, leader populiste du Parti pour la liberté, en Suisse.
Lors de sa visite au Temps le 26 mai, jour où la commune de Savièse a fait savoir qu’elle refusait d’accueillir Geert Wilders, Christoph Blocher avait rappelé que «l’UDC n’est pas du genre à censurer». «Je n’ai pas à cautionner ni à censurer les idées de chacun de nos membres, mais comme vice-président j’endosse une certaine coresponsabilité. Il est donc important qu’il n’y ait pas de dérapages», a-t-il ajouté. Le risque, à Savièse, était bien réel. Oskar Freysinger avait notamment prévu de diffuser Fitna, le court-métrage pour lequel Geert Wilders est poursuivi en justice pour incitation à la haine raciale et à la discrimination envers les musulmans. Il y compare le Coran au Mein Kampf d’Adolf Hitler.
Yvan Perrin, également vice-président du parti, relativise aussi les contacts d’Oskar Freysinger à l’étranger, mettant en avant la liberté d’expression. «Ce genre d’initiative ne pose aucun problème tant qu’elle ne se révèle pas contre-productive pour le parti», dit-il. Il ajoute n’avoir reçu aucun téléphone ou courriel de membres du parti qu’une telle rencontre importunerait. «J’en avais par contre reçu de nombreux à propos du débat sur l’homosexualité [le Valaisan Grégory Logean avait qualifié la section gay UDC de «tumeur»].»
Pour maintenir un effet de surprise, Oskar Freysinger n’avait pas jugé utile d’informer la direction de l’UDC de son initiative. Le Valaisan, qui avait défrayé la chronique en se rendant en décembre à un colloque anti-islam à Paris organisé par le «Bloc identitaire», n’est pas le seul conseiller national à fréquenter des mouvances de la droite radicale européenne. Ulrich Schlüer et Dominique Baettig l’ont aussi fait (LT du 21.05.2011).
L’UDC s’est par ailleurs déjà séparée de membres aux idées trop extrémistes. Ce fut le cas pour l’avocat genevois Pascal Junod, contraint à la démission en 1999, alors qu’il était candidat au Conseil national. La section genevoise avait auparavant frôlé la mise au ban du parti après avoir massivement rejeté la demande d’exclusion de l’avocat voulue par l’UDC Suisse. Toujours en 1999, le candidat tessinois au National Roger Etter, aujourd’hui en prison pour tentative de meurtre, avait défrayé la chronique en raison de son intérêt prononcé pour la Waffen-SS. Autre exemple, plus récent: en 2005, Pascal Trost s’est fait bannir de la section argovienne des Jeunes UDC. Parce qu’il avait été aperçu, le 1er août, parmi les perturbateurs du Grütli, aux côtés de membres du PNOS (Partei National Orientierter Schweizer).