Singine · Ce dimanche, les activistes du PNOS (Partei national orientierter Schweizer) ont rendez-vous dans la campagne fribourgeoise. On ne sait pas encore où: le patron du restaurant d’Alterswil qui devait les accueillir s’est ravisé en apprenant leur vraie identité.
marc-roland zoellig
Ce dimanche, la riante campagne singinoise pourrait accueillir des touristes d’un genre particulier. Le Partei national orientierter Schweizer (PNOS), groupuscule néonazi fondé en septembre 2000 à Liestal (BS), a en effet fixé ses assisesquelque part dans la région. Où ça? Pour le moment, rien n’est sûr. Initialement, les extrémistes s’étaient donné rendez-vous à Alterswil, au restaurant Alpenrose. «L’organisateur de la rencontre, qui m’a contacté par téléphone, m’a dit qu’il entendait fonder un nouveau parti politique», explique le patron du restaurant. Méfiant, il lui avait demandé s’il ne s’agissait pas d’un parti d’extrême droite. «Il m’a assuré que non.»
coups et blessures
Erwin Sauterel, lieutenant de préfet de la Singine, a toutefois découvert la véritable nature des jeunes politiciens mercredi, en rencontrant leur responsable pour discuter des mesures de sécurité à prendre dans le cadre de la manifestation. «Il m’a expliqué que leur parti n’appartenait pas à l’extrême droite, mais à la droite nationale», raconte Erwin Sauterel. La nuance n’a pas sauté aux yeux du patron de l’Alpenrose, contacté par les soins du lieutenant de préfet, qui a préféré tout annuler. «Je ne veux pas de ça chez moi.» Sans se démonter, l’organisateur a alors déclaré que la réunion se tiendra ailleurs.La police cantonale a été avertie et se tient sur ses gardes. «Nous allons évaluer la situation et nous prendrons des mesures adaptées le cas échéant», explique son porte-parole Hans Maradan. Car il n’est pas exclu que les choses dégénèrent en bataille rangée: les milieux autonomes bernois ont eu vent de la réunion du PNOS grâce à une «fuite» dans l’entourage des néonazis. Hier, leur site internet indiquait l’heure et le lieu où les activistes d’extrême droite étaient convenus de se rencontrer avant de rejoindre Alterswil. Et des graffitis antinazis ont déjà fleuri au centre du village.Les militants du PNOS -qui s’engagent, pêle-mêle, pour une «Suisse libre et fière», une «diminution du nombre d’étrangers», une «Europe des patries» et contre «la destruction de la nature»- vont-ils quand même se montrer? Leur inclination à la violence n’est en tout cas plus à prouver. Le mois dernier, Sascha Kunz (25ans), cofondateur et ancien président du parti, a été condamné à 16 mois de prison avec sursis pendant quatre ans pour agression, lésions corporelles simples et menaces par le Tribunal pénal de Bâle-Ville. L’ex-membre du groupuscule skinhead Blood&Honor a été impliqué dans plusieurs bagarres à Berne et à Bâle, entre octobre 1999 et juin 2002. L’actuel président du PNOS, Jona Gysin, n’est pas en reste. Condamné à 30 jours avec sursis en septembre, il a participé à des ratonnades menées par Kunz. Lors de l’une d’elles, il a notamment essuyé ses Doc Martens sur le visage d’un jeune homme fermement maintenu par l’ex-président…
le spectre du révisionniste
Le PNOS s’est fait connaître du grand public lors des dernières élections fédérales, en présentant une liste dans le canton d’Argovie. Jusqu’ici, le parti néonazi, dont l’emblème représente un morgenstern (masse d’armes médiévales) sur fond de croix suisse, n’est pas parvenu à obtenir une assise nationale. La réunion prévue en Singine pourrait avoir pour objectif -selon les autonomes bernois- de sortir le mouvement de ses fiefs bâlois, bernois, argovien et grison, pour l’étendre en Suisse romande.Derrière les jeunes activistes qui font le coup de poing se cache un personnage autrement plus inquiétant. Le révisionniste bernois Bernhard Schaub, 49 ans, ancien professeur d’histoire et d’allemand à l’école Rudolf-Steiner d’Adliswil (ZH), est en quelque sorte l’idéologue en chef du PNOS. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages et articles niant l’Holocauste et s’est exprimé lors de nombreuses manifestations organisées par les milieux d’extrême droite en Suisse et en Allemagne. Lorsqu’il était président du parti, Sascha Kunz n’aurait été, selon certains témoignages, que la marionnette de Bernhard Schaub. MRZ